Propriétés/EffetsCode ATC
J06BD05
Mécanisme d'action
Le sotrovimab est un anticorps monoclonal (Acm) humain de type IgG1 qui se lie à un épitope conservé du domaine de liaison au récepteur de la protéine de spicule du SARS-CoV-2 avec une constante de dissociation Kd = 0,21 nM. Le domaine Fc du sotrovimab contient les substitutions d'acides aminés M428L et N434S (modification LS) qui allongent la demi-vie d'élimination de l'anticorps sans entraver les fonctions effectrices conférées par le Fc de type sauvage en culture cellulaire.
In vitro, le sotrovimab a montré une stimulation FcγR dans des cellules rapporteuses Jurkat exprimant le FcγRIIa (allèle H131 à haute affinité), le FcγRIIIa (allèle V158 à haute affinité) et le FcγRIIb. Dans des essais cellulaires, le sotrovimab a montré une cytotoxicité à médiation cellulaire dépendante des anticorps (ADCC) et une phagocytose cellulaire dépendante des anticorps (ADCP).
Pharmacodynamique
Activité antivirale
Le sotrovimab a neutralisé le virus SARS-CoV-2 (USA WA1/2020) in vitro (CE50 76,6-132,5 ng/ml) et in vivo (≥5 mg/kg chez des hamsters traités par le sotrovimab avant une infection à SARS-CoV-2).
Facilitation de l'infection par des anticorps (antibody-dependant enhancement, ADE)
Le risque que le sotrovimab soit susceptible d'agir en médiateur de l'entrée et de la réplication du virus dans les cellules immunitaires a été examiné sur des cellules U937, des cellules dendritiques dérivées de monocytes primaires humains et des cellules mononucléaires de sang périphérique. L'essai n'a pas montré d'infection virale productive ni de production accrue de cytokines dans des cellules immunitaires qui étaient exposées au SARS-CoV-2 à des concentrations de sotrovimab égales à supérieures jusqu'à 1000 fois à la CE50.
Le potentiel d'ADE a également été étudié sur un modèle de hamster de SARS-CoV-2 utilisant le sotrovimab et la souche VIR-7831 (type sauvage, WT). Aucune des doses examinées – parmi lesquelles des doses inférieures à des taux neutralisants, descendant jusqu'à 0,05 mg/kg – n'a fourni d'indices de renforcement de la maladie. Une étude séparée a en outre été réalisée chez le hamster avec une version modifiée de l'anticorps parental S309 interagissant avec des récepteurs Fc du hamster (FcRs). Des essais utilisant l'anticorps modifié à des doses égales ou inférieures à des taux neutralisants n'ont fourni aucun indice d'ADE.
Résistance antivirale
Études en culture cellulaire: Il existe un risque potentiel d'échec du traitement dû au développement de variants viraux résistants au sotrovimab. Aucune émergence virale n'a été observée après 10 passages du virus (34 jours) en présence d'une concentration fixe d'anticorps, même à la plus faible concentration testée (~ 10x la CE50). L'application d'une méthode de sélection à concentration croissante visant à forcer l'émergence de variants résistants a permis d'identifier la mutation E340A comme une mutation résistante à l'Acm sotrovimab. Une substitution E340A, qui a émergé par sélection en culture cellulaire de virus résistants, présentait une réduction d'activité >100 fois dans un essai sur des particules pseudotypées virales (PPV).
Les évaluations des PPV en culture cellulaire ont été réalisées sur les protéines de spicule de Wuhan-Hu-1, Omicron BA.1, Omicron BA.2 et Omicron BA.5.
Celles-ci ont montré une sensibilité réduite au sotrovimab pour les polymorphismes de séquence de l'épitope K356T, P337H/L/N/R/T/K, E340A/K/G/I/Q/S/V, T345P et L441N dans la protéine de spicule de Wuhan-Hu-1. Les CE50 augmentaient de 5,1 à >304 fois par rapport à Wuhan-Hu-1 de type sauvage.
Ces études ont montré une sensibilité réduite au sotrovimab pour les polymorphismes de séquence de l'épitope P337H/S, E340D, V341F et K356T dans la protéine de spicule d'Omicron BA.1. Les CE50 augmentaient de 5,89 à >631 fois par rapport à la protéine de spicule d'Omicron BA.1. Ces études ont montré une sensibilité réduite au sotrovimab pour les polymorphismes de séquence de l'épitope P337H/N/S/T, E340D/G, K356A/M/N/Q/R/S/T et K440D dans la protéine de spicule d'Omicron BA.2. Les CE50 augmentaient de 5,13 à >143 fois par rapport à la protéine de spicule d'Omicron BA.2.
Ces études ont montré une sensibilité réduite au sotrovimab pour les polymorphismes de séquence de l'épitope P337A/H/N/S/T, E340D/G, V341F, K356A/E/M/N/Q/R/S/T et L441R dans la protéine de spicule d'Omicron BA.5. Les CE50 augmentaient de 5,83 à >152 fois par rapport à la protéine de spicule d'Omicron BA.5.
Les données de neutralisation des PPV et du SARS-CoV-2 authentique pour le sotrovimab sont résumées dans le tableau suivant (tableau 2).
La pertinence clinique de cette réduction de sensibilité d'un facteur >5, sur la base des données de neutralisation des pseudovirus ou du SARS-CoV-2 authentique, n'est pas connue. Il n'existe aucune donnée issue d'études cliniques randomisées et contrôlées relatives à l'évaluation de variants présentant une réduction de la sensibilité >5.
Tableau 2: Activité de neutralisation du sotrovimab contre les variants du SARS-CoV-2
Variant/Lignée porteuse de substitutions dans la protéine du spicule
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Taux de variation de la sensibilitéa (vrai virus)
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Taux de variation de la sensibilitéa (pseudovirus)
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Alpha (B.1.1.7)
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3,0
|
2,3
|
Bêta (B.1.351)
|
1,2
|
0,6
|
Gamma (P.1)
|
1,6
|
0,35
|
Delta (B.1.617.2)
|
0,4
|
1,0
|
Delta Plus (AY.1)
|
ND
|
1,1
|
Delta Plus (AY.2)
|
ND
|
1,3
|
Delta Plus (AY.4.2)
|
ND
|
1,6
|
Epsilon (B.1.427/B.1.429)
|
ND
|
0,7
|
Iota (B.1.526)
|
ND
|
0,6
|
Kappa (B.1.617.1)
|
0,9
|
0,7
|
Lambda (C.37)
|
ND
|
1,5
|
Omicron (B.1.1.529/ BA.1)
|
3,8
|
2,7
|
Omicron (BA.1.1)
|
4,3
|
3,3
|
Omicron (BA.2)
|
15,7 35,1 b, c
|
16
|
Omicron (BA.2.12.1)
|
25,1 c
|
16,6
|
Omicron (BA.2.75)
|
15,6
|
8,3
|
Omicron (BA.2.75.2)
|
ND
|
10
|
Omicron (BA.2.86)c
|
ND
|
100
|
Omicron (BA.3)
|
ND
|
7,3
|
Omicron (BA.4)
|
48,4
|
21,3
|
Omicron (BA.4.6)
|
115
|
57,9
|
Omicron (BA.5)
|
21,6
|
22,6
|
Omicron (BF.7)
|
ND
|
74,2
|
Omicron (BN.1)c, d
|
ND
|
778
|
Omicron (BQ.1)
|
ND
|
28,5
|
Omicron (BQ.1.1)
|
31,2
|
94
|
Omicron (BR.2)
|
ND
|
10,2
|
Omicron (CH1.1)
|
57,3
|
12,4
|
Omicron (EG.5.1)
|
9,5
|
ND
|
Omicron (HK.3)
|
ND
|
8,4
|
Omicron (HV.1)
|
ND
|
6,4
|
Omicron (JN.1) c, d
|
ND
|
252
|
Omicron (XBB.1)
|
ND
|
6,5
|
Omicron (XBB.1.5)
|
11,5
|
11,3
|
Omicron (XBB.1.5.10)
|
ND
|
7,6
|
Omicron (XBB.1.16)
|
10,6
|
6,9
|
Omicron (XBB.1.16.1)
|
ND
|
7,3
|
Omicron (XBB.2.3)
|
ND
|
5,7
|
Omicron (XBF)
|
ND
|
9,4
|
Aucune (XD)
|
2,1
|
ND
|
ND = non déterminé
a Taux de variation de la CE50, calculé par rapport au vrai virus de type sauvage (2019-nCoV/USAWA1/2020) ou au pseudovirus de type sauvage (séquence YP_009724390)
b Taux de variation de la CE90, calculé par rapport au virus authentique de type sauvage (2019-nCoV/USAWA1/2020), sur la base de deux isolats indépendants du virus SARS-CoV-2 Omicron BA.2.
c Les variants BN.2.86, BN.1 et JN.1 contiennent la substitution K356T, connue pour présenter une sensibilité réduite au sotrovimab.
d Il est peu probable que le sotrovimab soit efficace contre la COVID-19 provoquée par le variant Omicron BN.1 et JN.1 du virus SARS-CoV-2.
e L'OMS n'a pas donné de nom à ce variant.
Études cliniques: Des variants préoccupants ou à suivre (VOC/VOI) (variants of concern [VOC]/variants of interest [VOI]) du SARS-CoV-2 ont été détectés chez les participants à l'étude COMET-ICE (tableau 3).
Tableau 3. VOC/VOI du SARS-CoV-2 observés avec une prévalence ≥2% chez les participants à l'étude traités par le sotrovimab
Étude clinique
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VOC/VOI
|
Prévalence % (n/N)a
|
Participants remplissant le critère d'évaluation principal cliniqueb
|
COMET-ICE
|
Alpha (B.1.1.7)
|
10,4% (35/338)
|
1
|
Epsilon (B.1.427/B.1.429)
|
4,7% (16/338)
|
1
|
Gamma (P.1)
|
2,7% (9/338)
|
0
|
a n = nombre de participants traités par le sotrovimab et infectés par le VOC/VOI respectif; N = nombre total de participants traités par le sotrovimab pour lesquels des données sur la séquence de la protéine de spicule du SARS-CoV-2 étaient disponibles.
b Le critère d'évaluation principal clinique, relatif à la progression, était une hospitalisation >24 heures pour la prise en charge aiguë d'une maladie ou un décès quelle qu'en soit la cause jusqu'au jour 29.
Des virus SARS-CoV-2 porteurs de substitutions déjà présentes à l'inclusion et apparues sous traitement, à des positions d'acides aminés associées à une sensibilité réduite au sotrovimab in vitro, ont été observés dans l'étude COMET-ICE (tableau 4). Parmi les 32 participants traités par le sotrovimab chez lesquels une substitution aux positions d'acides aminés 337 et/ou 340 a été détectée à un moment quelconque, à l'inclusion ou après, seul un participant a atteint le critère d'évaluation principal relatif à la progression, défini par une hospitalisation >24 heures pour la prise en charge aiguë d'une maladie ou un décès quelle qu'en soit la cause jusqu'au jour 29. Une substitution E340K a été détectée après l'inclusion chez ce participant qui était infecté par le variant Epsilon du SARS-CoV-2.
Tableau 4. Substitutions présentes à l'inclusion et apparues sous traitement, détectées chez les participants traités par le sotrovimab, à des positions d'acides aminés associées à une sensibilité réduite au sotrovimab
Étude clinique
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Inclusiona
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Apparues sous traitementb
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Substitutions
|
Fréquence % (n/N)
|
Substitutions
|
Fréquence % (n/N)
|
COMET-ICE
|
P337H, E340A
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1,3% (4/307)
|
P337L/R, E340A/K/V
|
14,1% (24/170)
|
a n = nombre de participants traités par le sotrovimab ayant une substitution déjà présente à l'inclusion, aux positions d'acides aminés 337 ou 340 de la protéine de spicule; N = nombre total de participants traités par le sotrovimab pour lesquels des données sur la séquence étaient disponibles à l'inclusion
b n = nombre de participants traités par le sotrovimab chez lesquels des substitutions apparues sous traitement ont été détectées aux positions d'acides aminés 337 ou 340 de la protéine de spicule; N = nombre total de participants traités par le sotrovimab chez lesquels des données appariées de séquence étaient disponibles à l'inclusion et après l'inclusion
Efficacité clinique
L'étude 214367 (COMET-ICE), en cours, est une étude de phase II/III randomisée en double aveugle et contrôlée par placebo qui évalue les effets du sotrovimab comme traitement de la COVID-19 chez des patients adultes non hospitalisés à haut risque de complications de la maladie. Y ont été inclus des patients porteurs d'une infection à SARS-CoV-2 confirmée en laboratoire, présentant des symptômes depuis 5 jours au maximum et qui n'avaient besoin d'aucune forme de supplémentation en oxygène au moment de l'inclusion dans l'étude. Les patients inclus dans l'étude étaient âgés de 18 ans ou plus et présentaient au moins une des comorbidités suivantes: diabète, obésité (IMC >30), maladie rénale chronique, insuffisance cardiaque congestive, bronchopneumopathie chronique obstructive, ou un asthme modéré à sévère, ou étaient âgés de 55 ans et plus, sans égard aux comorbidités. Les patients qui avaient reçu un vaccin contre la COVID-19 n'ont pas été inclus dans l'étude. L'étude a été réalisée au moment où le virus Wuhan-Hu-1 de type sauvage était prédominant, les variants Alpha et Epsilon étant les plus fréquents (voir «Résistance antivirale, tableau 3»). Les patients ont été randomisés pour recevoir une perfusion unique de 500 mg de sotrovimab (N = 528) ou de placebo (N = 529) pendant 1 heure (population en intention de traiter [ITT] au jour 29).
46% des participants randomisés étaient des hommes. L'âge médian des patients de l'ensemble de la population randomisée était de 53 ans (intervalle: de 18 à 96 ans). 20% des participants étaient âgés de 65 ans ou plus, 11% avaient plus de 70 ans. La plupart des participants (87%) étaient de souche européenne, 8% étaient noirs ou afro-américains, 4% étaient asiatiques. La majorité des participants étaient d'origine ethnique hispanique ou latino-américaine (65%). 59% des participants ont reçu le sotrovimab ou un placebo dans les 3 jours, et 41% dans les 4 à 5 jours après l'apparition des symptômes de la COVID-19. Les quatre facteurs de risque ou comorbidités prédéfinis les plus fréquents étaient l'obésité (63%), l'âge de 55 ans ou plus (47%), le diabète nécessitant un traitement (22%) et l'asthme modéré à sévère (17%). Dans l'ensemble, les données démographiques et les caractéristiques de la maladie étaient équilibrées entre les bras de traitement.
Le critère d'évaluation principal, à savoir la progression de la COVID-19 au jour 29, était réduit de 79% (p <0,001) chez les patients qui recevaient le sotrovimab par rapport aux patients sous placebo (réduction relative du risque, corrigée). Le tableau 5 qui suit présente les résultats du critère d'évaluation principal et des principaux critères d'évaluation secondaires de l'étude COMET-ICE.
Tableau 5: Résultats des critères d'évaluation principal et secondaires dans la population en ITT au jour 29 (étude COMET-ICE)
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Sotrovimab (500 mg en perfusion IV) N= 528
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Placebo N = 529
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Critère d'évaluation principal
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Progression de la COVID-19 telle que définie par une hospitalisation >24 heures pour la prise en charge aiguë d'une maladie ou un décès quelle qu'en soit la cause (jour 29)
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Proportion (n, %) a
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6 (1%)
|
30 (6%)
|
Réduction relative du risque ajustée (IC à 95%)
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79% (50%, 91%)
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Valeur p
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<0,001
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Critères d'évaluation secondaires
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Progression vers le développement d'une COVID-19 respiratoire critique et/ou sévère (jour 29)b
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Proportion (n, %) c
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7 (1%)
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28 (5%)
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Réduction relative du risque ajustée (IC à 95%)
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74% (41%, 88%)
|
Valeur p
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0,002
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a
Aucun participant du bras sotrovimab, contrairement à 9 participants du bras placebo, n'a nécessité un transfert en unité de soins intensifs (USI). b Progression vers le développement d'une COVID-19 respiratoire critique et/ou sévère, définie par le besoin d'une supplémentation en oxygène (masque facial/canules nasales à faible débit, oxygène à haut débit, ventilation non invasive, ventilation mécanique ou oxygénation par membrane extracorporelle [ECMO]). c Aucun participant du groupe sotrovimab n'a eu besoin d'oxygène à haut débit, de masque sans réinspiration ou de ventilation mécanique, contrairement à 14 participants du bras placebo.
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